The Museum of the City of Liège
In June 1939, the Third Reich put up for sale at the Galerie Fischer in Lucerne a set of 125 major works from the history of modern art which came from German public collections, on the grounds that these belonged to a degenerate form of art which was incompatible with Nazi ideology and aesthetics. Within a few weeks, many collectors and some towns had gathered together the funds needed to buy these masterpieces; these towns included Basle, Lintz, Harvard, Paris, and … Liège.
The City of Liège, armed with 1,000,000 Francs (of which only 100,000 were actually spent!) purchased nine unique paintings by Picasso, Chagall, Gauguin, Franz Marc, Oscar Kokoshka, Max Liebermann, Marie Laurencin, Jules Pascin, and Ensor. The City of Liège, whose museums and galleries are the guests of honour at BRAFA 2010, is making this a special occasion by presenting, for the first time, eight of the nine works purchased in Lucerne. It so happens that while the BRAFA is on, James Ensor's "Death and the Masks" is headlining the exhibition dedicated to this Ostend master at Orsay, so it cannot be displayed here.
A prestigious stand will be specially built for the occasion, under the expert sponsorship of Galère BAM, the main contractor for the work on the magnificent Grand Curtius, the flagship Liège museum which was opened in March 2009. This exceptional presence at the BRAFA of the Liège masterpieces from the Lucerne sale prefigures the major exhibition "Les Poubelles du Reich", which is to be held for the inauguration of the new Centre International d'Art et de Culture marking the transformation of the present Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain (MAMAC) in the Parc de la Boverie in Liège. This centre, which will put the Cité Ardente firmly on the major international exhibition circuit, will be the result of architectural design applied to the very fine present-day building, a relic of the 1905 universal exhibition, after major work carried out thanks to the European ERDF fund, which will be starting in 2014.
The aim sought by the management of the City of Liège museums in this initiative is to make the public, art lovers, collectors, conservators and sponsors aware of this ambitious, costly exhibition, the design of which is already under way.
LA VENTE DE LUCERNE ET LES ACHATS DE PARIS
Extrait tiré « Des Mécènes pour Liège » par Pierre Henrion, Liège, 1998.
Dès le début des années '30, les dirigeants du Parti nazi se montrent hostiles aux recherches des avant-gardistes artistiques. Quand, en 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier, une véritable campagne de « désinformation » est mise sur pied afin de déprécier les créations dites « dégénérées ». C'est surtout l'expressionnisme qui est visé. Dans la seconde moitié de la décennie, une commission dirigée par Ziegler et patronnée par Goebbels est chargée de collecter dans les musées allemands les pièces qui ne correspondent pas à l'esthétique officielle du Parti. Plusieurs milliers d'œuvres sont détruites. D'autres sont cédées, comme les 114 pièces mises en vente à la Galerie Fischer de Lucerne en juin 1939.
Grâce à Jules Bosmant, Liège est représentée à la vente de Lucerne. La critique d'art parvient en effet à y intéresser l'échevin libéral Auguste Buisseret qui, quant à lui, convainc un groupe de mécènes de participer à l'opération. Ce groupe, constitué sous le nom d'Amis des Musées liégeois, est représenté par le baron Paul de Launoit, commissaire général du Gouvernement auprès de l'Exposition internationale de l'Eau, directeur à la banque de Bruxelles et de la Société Ougrée-Marihaye, et de Louis Lepage, directeur de l'Azote. Jean-Paul Depaire (Les achats de Lucerne, dans Le syndrome Picasso, Liège, 1990) retrace avec beaucoup de détails toutes les étapes de notre affaire.
Dans Souvenir d'un ancien Belge, Bosmant explique qu'en juin 1939, le Collège des Bourgmestre et Echevins de la Ville de Liège l'envoie à Lucerne afin, « par son intermédiaire, de délimiter autant que faire se pouvait, les secteurs d'intérêt de chacun, de modérer ainsi les enchères, et dès lors d'alimenter le moins possible, en devises étrangères, le trésor nazi, dont la proche utilisation faisait peu de doute ». Muni du rapport que Jules Bosmant tire de son expédition, Buisseret obtient de l'Etat une importance subvention.
Le Conseil communal approuve à l'unanimité l'engagement de la Ville. Cette dernière contribue pour 35% à l'achat des œuvres, l'Etat à hauteur de 30% ; les mécènes assument les 35% restants et avancent la totalité des sommes nécessaires.
La délégation liégeoise en Suisse est composée d'Auguste Buisseret, de Jacques Ochs, directeur de l'Académie et conservateur du Musée des Beaux-Arts, d'Olympe Gilbart, conseiller communal libéral et professeur d'histoire de l'art à l'Université, et d'Eugène Beaudouin, chef de division à l'administration communale et directeur du Service d'Aide aux Artistes. Ils sont accompagnés d'Emmanuel Fischer, directeur du Contentieux à l'Azote, représentant des mécènes et responsable des sommes avancées.
Neuf tableaux sont acquis pour 109 600 francs suisses auxquels s'ajoutent les 15% de frais prévus, ce qui donne 126 040 francs suisses, soit 834 952 francs belges. C'est l'achat le plus important jamais réalisé à Liège. Toutes les peintures sont des chefs-d'œuvre d'artistes à l'époque déjà célèbres et dont la notoriété ne s'est depuis ternie en aucune manière. Ce sont les fleurons du Musée d'Art moderne et d'Art contemporain : La famille Soler de Pablo Picasso, Le Sorcier d'Hiva-Oa de Paul Gauguin, Les masques et la mort de James Ensor, Monte-Carlo d'Oskar Kokoschka, La maison bleue de Marc Chagall, Portrait de jeune fille de Marie Laurencin, Le déjeuner de Jules Pascin, Le cavalier sur la plage de Max Liebermann et Les chevaux bleus de Franz Marc.
L'examen des budgets de la Ville de Liège entre 1939 et 1946 montre une dépense totale de 355 361,65 francs pour les « achats de Lucerne ». La même somme a été offerte par les « Amis des Musées liégeois ». Quant à l'Etat belge, il a versé un montant total de 310 460 francs. Cette distribution correspond à celle prévue à l'origine.
L'ensemble des apports s'élève donc à 1 021 183,30 francs soit 186 231 francs de plus que le coût des tableaux de Lucerne. Cette somme est en fait consacrée à des achats d'œuvres à Paris. Bien des marchands et collectionneurs y sont, à la fin des années '30, prêts à négocier à très bon prix. Le 1er août 1939, Ochs, Buisseret et Gilbart sont dans la capitale française et, le 11 août, La Meuse annonce l'achat de neuf tableaux. Il s'agit de Fleurs de Maurice Vlaminck, Le moulin de la Galette de Maurice Utrillo, Ecluse du moulin de Bouchardon d'Armand Guillaumin, Château de Comblaz de Paul Signac, Projet de vitrail de Marcel Gromaire, Violoniste de Kees Van Dongen, Coquillages de James Ensor, Nu d'Alexandre Picart Ledoux et Port d'Anvers 1906 d'Othon Friese.